La Gestion intégrée de l’eau par bassin versant

Le Conseil de l’eau du nord de la Gaspésie est l’un des 40 organismes de bassins versants mandatés par le gouvernement du Québec pour coordonner la gestion des ressources en eau par bassin versant (GIEBV) sur sa zone de gestion intégrée. Mais qu’est-ce que ça veut dire exactement?
 
 
 

Mise en contexte historique

Peut-être ne le saviez-vous pas, mais la GIEBV est un concept assez récent de l’histoire environnementale du Québec. En fait, ce n’est qu’après plusieurs décennies de discussions et de rapports qu’est enfin né un projet-pilote menant à la création du tout premier organisme de bassins versants (OBV), celui de la rivière Chaudière en 1997, il y a donc moins de 30 ans.
 
Puis en 2002, le gouvernement du Québec adopta la Politique nationale de l’eau afin de gérer et de protéger les ressources en eau douce de la province, décrites comme un patrimoine collectif. Il confia alors – pour certaines rivières considérées prioritaires – le mandat de coordination de la planification territoriale des ressources en eau et de leurs usages à trente-trois (33) OBV. Il faut noter, cependant, que quelques organismes environnementaux existaient déjà pour la conservation de certaines rivières, telles que la Jacques-Cartier ou l’Assomption, et qu’ils furent alors reconnus par le gouvernement du Québec.
 
   Image 1. Acquisition de données en rivière
 
 
Image 2. Acquisition de données en rivière
 
En 2007, confronté à une problématique de prolifération de cyanobactéries (algues bleu-vert) dans de nombreux plans d’eau, le Plan gouvernemental d’intervention sur les algues bleu-vert fut à son tour déployé, avec pour principaux objectifs de lutter contre les apports de phosphore qui favorisent la croissance des cyanobactéries et prévenir leur prolifération. L’année suivante, des discussions furent amorcées avec le Regroupement des organismes de bassins versants du Québec (ROBVQ) – créé en 2001 – afin de redécouper le territoire québécois en zones de gestion intégrée de l’eau (ZGIE) chacune sous la gouverne d’un OBV (MELCC 2019).
 
En 2009, tout le Québec, à l’exception de la région du Nord-du-Québec, fut dès lors divisé en 40 ZGIE par bassin versant, géré par le même nombre d’OBV (voir la figure 1). Quelques mois plus tard, l’Assemblée nationale du Québec adopta à l’unanimité la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection (MELCC 2019), consolidant ce réseau des OBV qui prévaut encore aujourd’hui.
 
Figure 1. Les quarante (40) zones de gestion intégrée de l’eau par bassin versant (ZGIEBV) du Québec (MELCCFP 2024).
Figure 1. Les quarante (40) zones de gestion intégrée de l’eau par bassin versant (ZGIEBV) du Québec (MELCCFP 2024).
 
Ceux-ci reçurent le mandat de gestion intégrée des ressources en eau (GIRE), lequel s’effectue par la concertation de différents acteurs – municipaux, économiques, communautaires, citoyens, autochtones – de sorte à bien identifier les problématiques prioritaires rencontrées sur le territoire et de concevoir un plan directeur de l’eau (PDE). Celui-ci décrit les objectifs et les actions ou interventions à entreprendre afin de faire face à ces problématiques. Les OBV reçurent également la responsabilité de promouvoir le PDE et sa mise en œuvre, toujours en collaboration avec les différents acteurs du milieu et dans la perspective de concilier leurs usages des ressources en eau (Projet de loi 27, 2009).
 
Cette loi fut bonifiée en 2017 par la reconnaissance des fonctions écologiques exercées par les milieux humides et hydriques. Elle fut renommée Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et favorisant une meilleure gouvernance de l’eau et des milieux associés. Les rôles des OBV et des tables de concertation y furent précisés (voir la figure 3) et chacune des MRC de la province dut, de leur côté, établir un plan régional des milieux humides et hydriques (PRMHH). Cette refonte de la loi permet notamment la restauration et la création de milieux humides et hydriques (Projet de loi 132, 2017).
 
Enfin, en 2022, des ajustements au texte de loi de 2009 sont venus consolider le mandat des OBV, soit celui de coordonner la gestion intégrée et concertée des ressources en eau par bassin versant sur leur zone de gestion intégrée, notamment en mobilisant les utilisateurs de l’eau et du territoire vers un passage à l’action (Projet de loi 102, 2022).
 
Figure 1. Les quarante (40) zones de gestion intégrée de l’eau par bassin versant (ZGIEBV) du Québec (MELCCFP 2024).
Figure 2. Étapes clés ayant mené à la mise en place de la gestion intégrée de l’eau par bassin versant (GIEBV) et à la consolidation d’un réseau d’organismes de  bassins versants (OBV) au Québec (ROBVQ 2024).
 
Qu’est-ce qu’un bassin versant ?
Un bassin versant est l’ensemble d’un territoire drainé par un cours d’eau. Il est constitué des limites naturelles d’écoulement des eaux de surface. Ce sont les crêtes des montagnes et les dénivellations du terrain qui déterminent le sens d’écoulement des eaux, et ce faisant, les limites d’un bassin versant. On appelle généralement ces crêtes de montagne et dénivellations la ligne de partage des eaux. L’ensemble des eaux qui s’écoulent dans un même bassin versant finit par rejoindre le même point de sortie nommé « exutoire ». Cet exutoire peut être un lac, une rivière, un fleuve, voire un océan, selon l’échelle de bassin versant considérée (ROBVQ 2024).
   Image 3. schéma d’un bassin versant
 
 
   Image 4. Kiosque d’information du CENG
 
 
Le PDE : l’outil de gestion intégrée des ressources en eau

Qu’est-ce qu’un plan directeur de l’eau?
C’est un outil de planification territoriale stratégique où sont expliquées les principales problématiques d’un territoire en ce qui concerne les ressources en eau, tant pour leur conservation que leur utilisation, et qui définit les orientations et objectifs à atteindre pour la prochaine décennie, tout en tenant compte des différents activités et usages liés à la ressource, tels que la présence d’habitations, les coupes forestières et la villégiature.

Rôles d’un OBV

Les quatre grands rôles d’un OBV ont été décrits, pour la première fois, dans la Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection de 2009; certains aspects ont par la suite été précisés dans les textes de loi de 2017 et 2022. Ces rôles ont initialement été attribués aux OBV par le ministère du Développement durable, de l’Environnement et des Parcs (MDDEP), aujourd’hui le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP).

 
 
Figure 1. Les quarante (40) zones de gestion intégrée de l’eau par bassin versant (ZGIEBV) du Québec (MELCCFP 2024).
Figure 3. Schéma des rôles d’un organisme de bassins versants attribués par le ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs (MELCCFP) (MELCC 2022, ROBVQ 2023).
 

La Table de concertation​

La Table de concertation est un maillon essentiel de la gestion intégrée de l’eau d’un territoire, puisqu’elle permet de réunir des intervenants de différents milieux, aux intérêts et enjeux qui leurs sont propres, afin de discuter des problématiques liées aux ressources en eau sur leur territoire commun. La table participe à l’élaboration, la mise en œuvre et le suivi du PDE. Elle est appelée à se prononcer à propos de projets ou de dossiers jugés pertinents où elle joue un rôle consultatif. Les membres peuvent y exprimer les priorités et les préoccupations des acteurs qu’ils représentent.
 
   Image 5. Table de concertation du CENG
 
 

 

En résumé 

  • Un OBV dresse un bilan des ressources en eau et de l’état des lacs, rivières et milieux humides de sa zone de gestion intégrée.
  • Il détermine avec les acteurs de l’eau du territoire les problématiques liées à l’eau, aux écosystèmes et à leurs usages auxquelles s’attaquer afin d’en améliorer l’état.
  • Il planifie, en concertation avec ces mêmes acteurs, les orientations et les objectifs stratégiques répondant à ces problématiques ainsi que les actions à mettre en place.
  • Il accompagne les acteurs de l’eau dans la mise en œuvre du PDE.
  • Il sensibilise la population et les différents acteurs de l’eau de son territoire à l’importance des bonnes pratiques permettant de maintenir l’excellente qualité des ressources en eau pour les années à venir.

Conseil de l’eau du nord de la Gaspésie 

L’OBV responsable de la gestion intégrée de l’eau entre Cap-Chat et la pointe Saint-Pierre (Percé) est le Conseil de l’eau du nord de la Gaspésie (CENG). Afin d’assurer à long terme la protection des ressources en eau de ce territoire, le CENG élabore des activités de sensibilisation destinées aux citoyens et aux élus, travaille à la conservation de milieux considérés critiques et collecte, sur le terrain, des données qui permettront de perfectionner les connaissances actuelles.

 
 
Le PDE 2024-2034, élaboré par le CENG et sa table de concertation, énonce une cinquantaine d’objectifs, portant sur six problématiques prioritaires, soit l’érosion des berges, les inondations, l’approvisionnement en eau potable de qualité, la surconsommation de l’eau, la dégradation des milieux humides et hydriques (lacs, cours d’eau et rives) et les conflits d’usage (liés aux usages récréatifs des rivières).Si le CENG coordonne les efforts, nous sommes tous – en tant qu’acteurs de l’eau – concernés par l’utilisation et la protection de nos ressources en eau, et ensemble, nous pouvons en décider l’avenir.
 

Références 

MELCC, 2019. Bilan du plan d’intervention sur les algues bleu-vert 2007-2017 et recommandations. Ministère de l’environnement et de la lutte contre les changements climatiques Juin 2019. 49 pages. Consulté en ligne le 12 juin 2024. bilan-plan-abv-2007-2017.pdf (gouv.qc.ca)

MELCC, 2022. Cadre de référence de la gestion intégrée des ressources en eau. Ministère de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques. Consulté en ligne le 8 mai 2024. cadre-reference-gire.pdf (gouv.qc.ca)

MELCCFP, 2024. Gestion intégrée des ressources en eau par bassins versants. Ministère de l’Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs. Consulté en ligne le 8 mai 2024. Gestion intégrée des ressources en eau par bassins versants (gouv.qc.ca)

Projet de loi 27 : Loi affirmant le caractère collectif des ressources en eau et visant à renforcer leur protection. 1ère session, 39e législature. Sanctionné le 12 juin 2009. Gazette officielle du Québec, 12 août 2009, 141e année, no 32.

Projet de loi 102 : Loi visant principalement à renforcer l’application des lois en matière d’environnement et de sécurité des barrages, à assurer une gestion responsable des pesticides et à mettre en œuvre certaines mesures du Plan pour une économie verte 2030 concernant les véhicules zéro émission. 2e session, 42e législature. Sanctionné le 12 avril 2022. Gazette officielle du Québec, 15 juin 2022, 154e année, no 24.

Projet de loi 132 : Loi concernant la conservation des milieux humides et hydriques. 1ère session, 41e législature. Sanctionné le 16 juin 2017. Gazette officielle du Québec, 30 août 2017, 149e année, no 35.

ROBVQ, 2023. Les organismes de bassins versants du Québec – Un réseau de professionnels en gestion de l’eau. Document de présentation. Regroupement des organismes de bassins versants du Québec. Consulté en ligne le 27 juin 2024. ROBVQ_OBV_Document-presentation_MAJ_nov023_LR.pdf (obvrly.ca)

ROBVQ, 2024. La gestion intégrée de l’eau par bassin versant – GIEBV. Regroupement des organismes de bassins versants du Québec. Consulté en ligne le 15 avril 2024. La GIEBV | ROBVQ

ROBVQ, 2024b. Le concept de bassin versant. Regroupement des organismes de bassins versants du Québec. Consulté en ligne le 27 juin 2024. Le concept de bassin versant | ROBVQ