Vue aérienne du site minier à Murdochville.
SOURCE: Base de données topographiques du Québec, Maxar et Esri Canada (2023)
 

 

Survol historique

La mine située à Murdochville est un lieu privilégié pour l’exploitation du cuivre depuis le début du 20e siècle. L’exploration des monts Copper et Needle commence dès 1909 alors que la ville de Murdochville est fondée en 1953, suite à l’exploitation fructueuse d’un gisement souterrain.
Toutefois, en 1999, les réserves de cuivre de la mine souterraine semblent s’être épuisées et en 2002, la fonderie cesse définitivement ses activités. Le rapport entre le prix du cuivre et les coûts d’exploitation d’un minerai moins concentré rend le projet beaucoup moins rentable1.
Depuis, d’importants travaux de décontamination ont eu lieu tant sur le territoire de la ville qu’au port de Gaspé, où les produits de la fonderie étaient acheminés2.

Un contexte mondial qui change

Maintenant que l’utilisation des combustibles fossiles est reconnue comme étant dommageable pour le climat, le monde se tourne vers des alternatives énergétiques plus respectueuses de l’environnement. L’électrification des transports et la production d’énergie par les filières éolienne ou solaire nécessitent de grandes quantités de métaux, dont du cuivre3.
Il est estimé que la demande mondiale en cuivre liée à la transition énergétique sera à son maximum au milieu des années 20304. La relance d’une exploitation de la mine du mont Copper à Murdochville s’inscrit ainsi dans cette tendance mondiale.

Le projet de métaux Osisko

Métaux Osisko (Osisko Metals Incorporated) propose d’extraire du minerai de cuivre à partir de la mine à ciel ouvert située au mont Copper et d’en générer, sur place, un concentré de cuivre qui sera ensuite acheminé – via le port de Gaspé – vers des fonderies hors du Québec. La minière prévoit une phase de construction à partir de 2026 et une entrée en exploitation dès 2029. Il est aussi estimé qu’un autre gisement, celui-ci souterrain, serait exploitable sous le mont Porphyre5.

L’eau et l’extraction du cuivre

Extraire du minerai de cuivre, le broyer et générer un concentré prêt pour une fonderie nécessitent de l’énergie et de grandes quantités d’eau. Afin de mieux outiller les citoyens pour comprendre les processus impliqués dans l’extraction, la concentration du cuivre et la gestion des résidus miniers ainsi que leurs impacts potentiels sur les ressources en eau, le Conseil de l’eau du nord de la Gaspésie (CENG) propose de l’information vulgarisée sur les processus métallurgiques impliqués dans l’extraction et le raffinage du cuivre.
 

La nature du dépôt de cuivre du gisement du mont Copper

Un minerai se définit comme de la roche contenant des métaux pouvant être isolés et ayant une valeur marchande. De façon générale, le minerai de cuivre se retrouve sous diverses formes. Principalement, les minerais font partie d’une ou l’autre des deux familles suivantes : les oxydes de cuivre ou les sulfures de cuivre. Ces deux familles de minerai présentent une structure chimique distincte et nécessitent différents procédés pour en extraire le cuivre métallique.
 
Minerais d’oxyde de cuivre : cristaux de cuprites 
sur malachite. 
SOURCE: Didier Descouens
Minerais de sulfure de cuivre :
cristaux de chalcopyrite sur des cristaux de quartz
SOURCE: Robert M. Lavinsky
La majorité du cuivre identifié au mont Copper est un amalgame de sulfure de cuivre, d’une faible quantité d’autres métaux précieux (possibilité d’argent et de molybdène) et de roches sans valeur6. Les estimations avancées par Métaux Osisko sont de l’ordre de 456 millions de tonnes métriques de minerai de sulfure de cuivre (concentration de 0,31%) dans la proximité de la mine existante du mont Copper uniquement. Cela représente un horizon temporel d’exploitation d’une durée d’environ 17 ans pour un taux d’exploitation de 70 000 tonnes de minerai par jour. Les monts Porphyre et Needle sont aussi potentiellement riches en cuivre. Les récents estimés tendent notamment à démontrer un potentiel important pour une exploitation souterraine au mont Porphyre.
NOTE : Les résultats des derniers forages exploratoires effectués par Métaux Osisko leur permettent d’estimer qu’il y aurait un total de 1 412 millions de tonnes de minerais de cuivre d’une concentration moyenne de 0,31%. La limite inférieure de la minéralisation rentable serait plus profonde que les premières estimations. Les études sont en cours afin de raffiner ces résultats et de statuer sur le ratio sulfures/oxydes présent.
 

Minerai : l’extraire et le broyer

Comme le métal auquel on s’intéresse n’est présent qu’en faible concentration (approximativement 0,31% pour le minerai du mont Copper), il faut lui faire subir plusieurs transformations tant mécaniques que chimiques afin d’obtenir du cuivre métallique pur.
La première étape consiste à récolter le minerai. L’industrie utilise habituellement des explosifs pour décrocher les morceaux de roche. Cette étape doit être soigneusement planifiée afin que les explosifs brisent le minerai efficacement pour ainsi diminuer les efforts à faire pour l’étape suivante. Le minerai est ensuite acheminé par camion vers le lieu du broyage. Les sites miniers à ciel ouvert doivent être arrosés en surface assez régulièrement afin de réduire la poussière que génèrent l’extraction et le transport du minerai (image 3). Il s’agit de la première source de consommation d’eau d’envergure dans un tel projet7.
Opérations en cours dans un site minier à ciel ouvert et impliquant l’arrosage du sol pour réduire la production de poussière. 
SOURCE: Jean Beaufort
  Broyeur giratoire 
SOURCE: Nick Bonzey, Juneau, AK
Le broyage implique de réduire la roche en de fines particules de taille déterminée. Pour ce faire, on utilise différents concasseurs et broyeurs giratoires (image 4) pour atteindre une taille de particules très fine. Ceci permet aux particules de cuivre de se détacher mécaniquement de la roche tout en y restant mélangé. On ajoute de l’eau, ce qui produit le lisier de cuivre. Il s’agit d’une deuxième source importante de consommation d’eau 7 8 . L’ajout d’eau au sulfure de cuivre génère une réaction chimique dont un des sous-produits est l’acide sulfurique. Le lisier de cuivre est donc un mélange acide.

La concentration du minerai

Le lisier de cuivre – une boue acide constituée de minerai de cuivre et de roche stérile – doit subir une transformation permettant de sélectionner et retirer les particules de sulfure de cuivre du restant du mélange. Pour ce faire, l’industrie utilise une méthode nommée moussage et flottation à l’intérieur de cuves appelées cellules de moussage et flottation. Le résultat du processus est appelé le concentré.
 Cellules de flottation 
SOURCE: Plazak
 Mousse de sulfure de cuivre 
SOURCE: Géomartin
Le principe général repose sur les propriétés chimiques des sulfures de cuivre ainsi que sur les propriétés physiques de la mousse. Les sulfures de cuivre, dans leur état broyé, sont hydrosolubles, c’est-à-dire qu’ils peuvent se dissoudre dans l’eau. Lorsqu’on ajoute certains composés chimiques, appelés collecteurs, ces derniers vont se lier aux sulfures de cuivre pour les rendre insolubles. En y introduisant un agent moussant, des bulles d’air et de l’agitation, le collecteur auquel le sulfure de cuivre est attaché se lie aux bulles et remonte à la surface de la cellule. La mousse ainsi obtenue est écumée. Au fond de la cellule, s’agglomèrent les particules de roche stérile et sans valeur : des résidus miniers. Les résidus sont acheminés par tuyaux vers le lieu de stockage des résidus. L’eau qui y est encore présente est acide et doit être récupérée et réutilisée dans les cellules de flottation7. Il s’agit d’une troisième source majeure d’utilisation de l’eau dans un projet tel que celui de Métaux Osisko.
Concrètement, le processus est plus complexe qu’il n’y paraît. L’industrie doit habituellement utiliser des collecteurs différents pour capter un maximum de cuivre (xanthate, thionocarbamates, etc.). Aussi, des modificateurs sont utilisés pour faire varier l’acidité du mélange de la cellule de moussage et flottation avec précision. Il peut aussi arriver que le lisier accumulé au fond de la cellule contienne encore du cuivre et qu’il soit réintroduit dans la cellule afin d’aller chercher un maximum de cuivre.
Les développements récents dans les techniques de moussage et flottation augmentent l’efficacité de l’extraction des sulfures de cuivre. De plus, cela tend à diminuer la quantité de sulfures de cuivre encore présente dans les résidus miniers. Ces développements ont pour impact de réduire la quantité d’énergie et, surtout, de diminuer l’utilisation de l’eau pour extraire une même quantité de cuivre9.

Déshydrater le concentré pour l’acheminer vers la fonderie

Le produit du moussage et de la flottation est constitué en grande partie d’eau (jusqu’à 75%)7. Afin d’acheminer le concentré vers la fonderie et poursuivre le processus de purification, l’industrie doit retirer l’eau par des processus de floculation/décantation et filtration.
Le processus s’effectue habituellement à l’intérieur de réservoirs dont le fond est incliné vers le centre. Un agent floculant est ajouté au concentré et fait en sorte que les particules solides contenant le cuivre se déposent au fond. Elles sont ensuite récupérées par de la tuyauterie.
 Schéma d’un concentrateur giratoire
Le concentré est ensuite filtré à l’aide de différentes méthodes (passives et par pression) pour retirer la quasi-totalité de l’eau encore présente. Après cette étape, la concentration en cuivre se situe entre 25 et 40% pour une concentration en eau d’environ 9%.

Les risques pour l’eau associés à l’exploitation minière

L’industrie minière du cuivre est une industrie qui consomme de grandes quantités d’eau et peut représenter des risques pour les bassins versants où elle s’installe. Il est possible de classer ces risques en deux grandes catégories : le risque de contamination lié aux opérations et le risque associé à la surconsommation de l’eau par l’industrie.

Le risque de contamination lié aux opérations

 

Le premier risque est lié à l’exposition du minerai à l’eau et à l’air. En effet, lorsque les minerais sulfurisés y sont exposés, une réaction spontanée s’effectue et produit de l’acide sulfurique. L’eau acide peut ensuite lessiver les minéraux et les métaux lourds présents dans la roche qu’elle rencontre au cours du ruissellement. Ce processus peut s’exercer en surface, mais aussi dans le réseau hydrologique souterrain. Afin de protéger les sources d’eau potable, il faut s’assurer que les prises d’approvisionnement en eau ne se trouvent pas en aval, dans le même sous-bassin versant recueillant l’eau qui s’écoule de la mine. Il faut également mentionner que le type de sol joue un rôle important dans le pouvoir tampon de l’eau des effluents miniers. Un sol calcaire aura tendance à augmenter le pouvoir tampon de l’eau et ainsi réduire l’acidification.
Les opérations ayant le potentiel de générer une contamination de l’eau sont reliées à deux vulnérabilités principales. La première concerne la rupture de canalisations contenant des résidus miniers ou de l’acide sulfurique. La deuxième concerne l’échec du confinement des résidus miniers.
Selon une vaste étude effectuée aux États-Unis portant sur quatorze mines de sulfures de cuivre, tous les sites miniers ayant été étudiés ont connu de multiples épisodes de rupture de canalisations ayant pour conséquence un déversement d’acide sulfurique de l’ordre de plusieurs milliers de litres. Les éléments déclencheurs des déversements les plus importants impliquent des ruptures d’approvisionnement en énergie (coupures de courant électrique) et le blocage des canalisations dû au gel hivernal et à la rupture des soudures10.
Aussi, la majorité des sites étudiés ont subi des bris de confinement des résidus miniers ou un échec/bris d’équipement relié au système de décontamination de l’eau avant le rejet. Le plus souvent, ces événements se sont produits lors d’événements climatiques extrêmes, comme des précipitations abondantes.
Que ce soit dû à une rupture de canalisation ou un échec du confinement des résidus miniers ou de l’eau issue des résidus miniers, les répercussions pour la ressource en eau ont été importantes et, dans certains cas, ont mené à des poursuites judiciaires de l’État contre les industriels10.

Les risques associés à la surconsommation d’eau

 

Les risques associés à la surconsommation de l’eau lors des opérations minières concernent le rabattement des aquifères. Un aquifère est une formation rocheuse perméable et poreuse qui contient de l’eau et qui peut la laisser circuler librement. Comme l’extraction et la concentration des minerais sulfurés consomment d’énormes quantités d’eau, celle-ci doit être puisée à proximité et ceci peut représenter, notamment, un risque pour l’approvisionnement en eau pour d’autres usages. De plus, si le processus perdure dans le temps, ceci peut aussi représenter un risque d’affaissement du sol. Il est nécessaire d’examiner la vulnérabilité de la zone d’intérêt d’un projet minier afin de déterminer les conséquences qu’une éventuelle exploitation minière peut avoir sur les nappes phréatiques environnantes.

Ce qu’il faut retenir

 

L’exploitation d’une mine de cuivre présente des enjeux importants pour l’eau et la qualité de l’environnement. Il importe de les considérer afin que la population soit consciente des implications environnementales du développement d’un tel projet, mais également afin de s’assurer que des mesures adéquates de mitigation des impacts et de gestion des risques soient mises en place par le promoteur, advenant la réalisation du projet.

Références:

1https://desterresminees.pasc.ca/breves-extractives/murdochville-noranda-mines-uranium/ 

2https://www.lesaffaires.com/secteurs-d-activite/immobilier/murdochville-toujours-entierement-contaminee-pour-quebec/566088

3https://www.forbes.com/sites/davidblackmon/2022/08/16/new-study-finds-that-the-future-of-copper-is-coming-at-us-fast/?sh=7f0cdf3932dc

4https://cdn.ihsmarkit.com/www/pdf/0722/The-Future-of-Copper_Full-Report_14July2022.pdf

5https://www.youtube.com/watch?v=noW2xGq6fBU

6https://osiskometals.com/wp-content/uploads/2022/07/Osisko-Metals-Gaspe-Copper-Project-2022-43101-Technical-Report-20220609.pdf

7Mark E. Schlesinger; Matthew J. King; Kathryn C. Sole et William G. Davenport, 2011. Extractive Metallurgy of Copper, Elsevier, Amsterdam.

8Robert Bruce et Tyler Seaman, 2014. Reducing fresh water use in the production of metals, Teck Resources Limited, Canada.

9Bilal, M. Park, I. Hornn, V. Ito, M. Hassan, F.U. Jeon, S. et Hiroyoshi, N. 2022 The Challenges and Prospects of Recovering Fine Copper Sulfides from Tailings Using Different Flotation Techniques: A Review. Minerals, 12, 586.

10Earthworks, U.S. Copper Porphyry Mines: The Track Record of Water Quality Impacts Resulting from Pipeline Spills, Tailings Failures, Water Collection and Treatment Failures, July 2012 (révisé November 2012). Disponible au : https://earthworks.org/publications/us_copper_porphyry_mines/